Dire qu’en 2024, des patients de 70 ans se voient encore refuser le vaccin contre le zona relève d’une aberration médicale. Alors que le risque de complications explose avec l’âge, certaines recommandations persistent à exclure une partie des seniors, à rebours des dernières données scientifiques. Les chiffres sont formels : l’efficacité du vaccin chez les plus de 70 ans se maintient, parfois même dépasse celle observée chez leurs cadets. Pourtant, sur le terrain, la réalité demeure contrastée.
Les lignes directrices diffèrent d’une instance à l’autre. Quand les sociétés savantes appellent à une couverture vaccinale large, certaines autorités sanitaires restent prudentes, désignant des groupes à exclure sans consensus clair. Conséquence directe : d’un cabinet à l’autre, d’un département à l’autre, des patients de 70 ans passent entre les mailles du filet, exposés à un virus qui, à cet âge, ne pardonne plus vraiment. Ce flou laisse place à des décisions hétérogènes, souvent au détriment de la sécurité des seniors.
Le zona chez les plus de 70 ans : pourquoi la vaccination est-elle recommandée ?
Chaque année, le zona frappe fort chez les personnes âgées. Provoqué par la réactivation du virus varicelle-zona (VZV), ce mal profite du déclin progressif de l’immunité après l’enfance. Le VZV, loin d’être éradiqué après une première varicelle, s’installe durablement dans les ganglions nerveux. Des années plus tard, il peut resurgir sans prévenir, profitant de la moindre faiblesse du système immunitaire.
Chez les plus de 70 ans, le zona ne se limite pas à une simple éruption cutanée. Les douleurs post-zostériennes, redoutées et tenaces, s’invitent parfois pour de longs mois. Ces douleurs nerveuses, sourdes, résistent souvent aux traitements et impactent lourdement la vie quotidienne, parfois jusqu’à miner l’autonomie. Santé publique France a d’ailleurs chiffré le fardeau humain et économique du zona : chez les seniors, il est loin d’être anodin.
La vaccination offre une réponse solide face à ce risque. Initiée dès 65 ans selon la Haute Autorité de Santé, elle vise à renforcer la protection des plus fragiles et à limiter les séquelles, notamment ces névralgies chroniques qui empoisonnent le quotidien. Contrairement à la vaccination contre la varicelle, qui concerne surtout ceux qui n’ont jamais contracté la maladie, le vaccin contre le zona cible les adultes matures, exposés au réveil du virus. Dans un pays qui vieillit, la question n’est plus anecdotique : c’est un enjeu de santé publique de première ligne.
Vaccin contre le zona : efficacité réelle et retours d’expérience
L’arrivée de Shingrix, vaccin recombinant signé GSK, a changé la donne pour la prévention du zona. Sa formule mise sur la glycoprotéine E du VZV, appuyée par l’adjuvant AS01B, pour stimuler l’immunité. Le protocole, deux doses à deux mois d’intervalle (ajustable selon les situations), s’adresse aux adultes à partir de 50 ans, mais tout particulièrement aux plus âgés.
Les essais cliniques de phase 3, menés à grande échelle, sont éloquents : Shingrix affiche jusqu’à 91 % d’efficacité chez les plus de 50 ans en bonne santé, et reste robustement protecteur chez les immunodéprimés (près de 70 % d’efficacité). La tranche des plus de 70 ans bénéficie pleinement de cette performance : pas de chute brutale de protection avec l’âge, contrairement au Zostavax, vaccin vivant atténué désormais retiré du marché. Pour les seniors, la prévention des douleurs post-zostériennes est elle aussi confirmée.
Sur le terrain, les campagnes de vaccination et la surveillance post-commercialisation confirment ces résultats. Mais la vigilance s’impose : la pharmacovigilance européenne et l’EMA signalent des effets indésirables, le plus souvent bénins (rougeur, fièvre, douleurs locales), mais aussi quelques signalements plus graves, comme des syndromes auto-immuns, certains cancers ou décès, bien que ces derniers restent exceptionnels.
La Commission de la transparence a reconnu l’intérêt médical de Shingrix, lui accordant un statut supérieur à ses prédécesseurs. L’engouement est tel que des tensions d’approvisionnement pointent déjà pour l’an prochain. Il faut donc trancher : qui doit en bénéficier en priorité, notamment parmi les groupes à risque ?
Groupes de patients à exclure : qui doit éviter la vaccination à 70 ans ?
Shingrix, vaccin recombinant, séduit par son efficacité et sa tolérance. Cependant, la prudence reste de mise pour quelques profils précis. Les recommandations françaises ciblent les plus de 65 ans, mais certaines situations médicales imposent un examen plus minutieux.
Contre-indications et précautions
Voici les situations où la vaccination contre le zona doit être repoussée, voire écartée :
- Antécédent d’allergie à l’un des composants du vaccin, en particulier la glycoprotéine E ou l’adjuvant AS01B.
- Réaction anaphylactique après une dose précédente de Shingrix.
- Maladie aiguë fébrile et sévère : dans ce cas, il vaut mieux différer l’injection.
Pour les personnes immunodéprimées, la donne a changé : la vaccination n’est plus systématiquement prohibée. Néanmoins, en cas de maladie auto-immune évolutive ou d’antécédents neurologiques graves (par exemple, syndrome de Guillain-Barré), le risque doit être soigneusement pesé. La littérature médicale relève de rares complications, ce qui nécessite une décision individualisée.
La vaccination n’est généralement pas proposée aux patients en phase aiguë sévère non stabilisée, ni à ceux sous immunosuppresseurs lourds. Un épisode de zona récent invite souvent à différer, mais pas à écarter définitivement la protection vaccinale. Dans tous les cas, la décision se prend à l’issue d’un échange approfondi avec le médecin, en tenant compte de l’état de santé général et des traitements suivis.
Parler à son médecin : la meilleure façon d’obtenir un avis personnalisé
Avant toute vaccination à 70 ans, une consultation médicale s’impose. L’état de santé, les antécédents, les traitements en cours, tout doit être passé au crible. C’est ce dialogue qui permet d’évaluer finement le rapport bénéfice-risque, en fonction du risque de zona, de ses complications, mais aussi des potentiels effets indésirables du vaccin.
Le médecin ajuste sa recommandation en fonction du parcours de chacun. À titre d’exemple, une personne traitée pour une maladie chronique ou suivie pour un trouble auto-immun n’aura pas la même réponse qu’un senior en parfaite santé. Des antécédents allergiques ou une infection aiguë récente peuvent aussi peser dans la balance. Ce temps d’échange permet d’envisager toutes les alternatives.
Si la vaccination n’est pas retenue, une surveillance accrue sera proposée, et le recours précoce à un antiviral comme le valaciclovir (Zelitrex) pourra être anticipé en cas de réveil du virus. Cette approche personnalisée, alignée avec les dernières recommandations et données issues de la pharmacovigilance, offre une vraie sécurité.
Loin de se limiter à l’acte vaccinal, cet accompagnement aborde aussi la prévention, la détection des premiers symptômes, sans oublier la gestion des douleurs post-zostériennes. Les patients disposent ainsi d’une information transparente, précise et actualisée. Le choix se fait alors en connaissance de cause, main dans la main avec le praticien.
Au bout du compte, il ne s’agit pas seulement de cocher une case vaccinale sur un carnet de santé, mais d’offrir à chaque senior la possibilité d’avancer l’esprit plus tranquille, sans se laisser surprendre par un ennemi que l’on croyait endormi.


